Lentement, les douces collines de la vallée du Kiesental cèdent leur place aux crêtes et aux vallons de l’Emme: nous sommes dans l'Emmental, patrie de Gotthelf, un paysage rustique tout droit sorti d'un livre d'images. À Berthoud, le château s’élève fièrement de ses hauteurs de grès et dans le vallon du Wynigentäli, les imposantes fermes s’affichent avec superbe, tandis que les «Taunerhüttli», les petites bâtisses des Tauner, ces paysans jadis manouvriers, se serrent dans l’ombre. Après les petites villes de Herzogenbuchsee et Langenthal, on traverse les prairies irriguées de la Langeten, dont les crues périodiques viennent nourrir les prairies.

Au couvent de St. Urban, on peut admirer dans le silence l'art sculptural des stalles baroques, avant d’être ramené à la réalité par le bruit de l'autoroute de la vallée du Wiggertal, qui reste en arrière-fond jusqu'à Sursee. Sur le haut mamelon plat, l’émetteur de radio national de Beromünster touche le ciel, tandis que la sinistre tour de Richensee monte la garde dans la dépression entre les lacs Hallwilersee et Baldeggersee. Durant la montée, le château de Heidegg, grâce à sa roseraie, apparaît quant à lui tout sauf sinistre.

Une longue dorsale, le Lindenberg, sépare la campagne lucernoise de l'Argovie. La descente tout schuss dans le Freiamt jusqu’au couvent rénové de Muri précède les vastes terrains alluviaux de la vallée du Reusstal, un paisible paradis naturel, et la montée vers le Säuliamt, jadis une région plutôt pauvre à l’écart des voies commerciales. Mais l'autoroute met très vite un terme à l'idylle campagnarde. Bien qu’autonomes et ruraux, Birmensdorf, Urdorf et Schlieren se trouvent déjà dans l’ombre de la métropole de Zurich.